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La lettre ouverte à nos proches d'Elodie Oprychal

Dernière mise à jour : 6 févr. 2020

L'objectif de ces lettres ouvertes est de pouvoir faire comprendre à nos proches (vous qui nous lisez) ce par quoi nous passons lorsque nous vivons un parcours PMA (les épreuves, nos émotions, nos attitudes rationnelles et parfois irrationnelles aussi...).

C'est aussi vous faire passer un message avec toute notre bienveillance pour vous "aider" à savoir comment se comporter avec nous, pour vous "aider" à comprendre comment adapter vos mots face à nous, pour vous "expliquer" comment nous soutenir quand nous en avons besoin.


Ces lettres ont été rédigées par des femmes en parcours PMA dont chaque histoire est unique et révèle des maux qu'elles ont exprimé par leurs propres mots. Toutes ces lettres sont dictées par l'amour. Elles reflètent la réalité de nos vies, soyez indulgents, nous vous livrons une partie de nos âmes dans l'espoir de lever certains tabous et de libérer nos paroles communes.


 

A vous, certains membres de la famille, et certains amis (es),


Aujourd’hui, j’ai besoin de vous exprimer ce que je ressens depuis de nombreux et douloureux mois.


Après notre mariage en juin 2016, tout le monde c’est empressé de nous demander à quel moment nous agrandirions la famille…. Et je m’entendais dire régulièrement "Elo tu es toujours à l’aise avec les enfants, tu es la super tata, tu serais une super maman…."

A ce moment-là nous y pensions mais sans réellement se lancer dans le projet de fonder notre famille.


Au moment où nous avons pris cette décision, nous avons choisis de ne pas vous en parler, en se disant qu’on aurait le temps, au moment venu, de vous annoncer la bonne nouvelle : celle que la famille va s’agrandir.


Malheureusement tout ne se passe jamais comme prévu. Premier rendez-vous en PMA pour nous, un sujet "relativement tabou" car j'ai peur d’être jugé…


Quand enfin je commence à en parler, certains d’entre vous n’ont pas trouvé mieux à me dire que "c’est dans ma tête", que "j’y pense trop", que "jamais ça ne pourra arriver en étant autant dans l’attente"...


Mais, à ce moment là personne n'a compris le néant dans lequel nous nous trouvions.

Être incapable de faire "un bébé de l’amour" car nous devons tout contrôler sans cesse et ne penser plus qu’à ça au vu des traitements et examens…


Certains d’entre vous ont totalement dédramatisé la PMA en me disant que "je n’étais pas la seule à passer par là", que "les échecs viennent sûrement du fait que ce n’est pas le moment".

Mais comment vous dire, qu’on ne choisit pas le moment en PMA…


Au lieu de me comparer à d’autres couples dans ce cas, j’aurais aimé que vous me preniez dans vos bras, que je puisse pleurer toutes les larmes de mon corps, quand j’en avais besoin.

Car oui, aujourd’hui sans la médecine, je ne suis pas capable de fonder ma famille… Sans oublier que la pudeur m’a quitté. A chaque examen, je me déshabille par habitude comme si tout est normal. On me fait allonger les fesses en bas de la table, les jambes écartées plusieurs fois par semaine selon le protocole PMA.


J’aurais voulu que vous compreniez que notre vie est aujourd’hui rythmée pas les injections, les prises de sang, les échos... et aussi l’espoir et l’angoisse à chaque tentative, que cela fonctionne ou non…


Vous écrire cette lettre aujourd’hui, c’est pour vous dire que je suis dans une situation difficile où par moment j’ai l’impression que mon corps ne m’appartient plus. Vous dire que la PMA, ces 3 lettres rythment, un mois sur deux, notre vie et surtout qui nous font espérer et pleurer depuis plus d’un an.

Il n’y a pas de recette miracles. Mais, il faut que vous compreniez que pour nous ce n’est pas un tabou.


Nous n’avons pas honte d’en passer par là, et nous aimerions que vous ne soyez pas aussi gêné de nous en parler.

A voir certains de vos comportements, j'interprète peut-être mais c'est ce que je ressens, c’est comme si nous étions dépendants de la PMA, que nous ne mettons pas assez de bonne volonté dans notre projet, que dans notre tête il y a toujours trop de choses, ce qui empêcherait mon corps de me permettre d’être enceinte.


J’aimerais que vous arrêtiez de me dire que ce n’est pas grave car pour nous ça l’ai.

Quand le but de votre vie est de fonder votre famille et que mois après mois les échecs se suivent, moralement et physiquement cela est éprouvant.


Je ne fais de reproches à personne. J’ai envie et besoin que vous compreniez notre parcours, notre combat et toutes les conséquences que cela a pour nous.

Ne râlez pas quand nous arrivons en retard, c’est à cause de la piqure. Essayez de comprendre mes sautes d’humeur à répétions, ma fatigue et mon irritabilité qui sont mes meilleures amies depuis des mois.


Aujourd’hui je suis à bout de force. Les traitements sont épuisants, la fatigue morale prend le dessus sur tout et j’ai l’impression d’être une aiguille noyée dans une botte de foin.


Alors, s’il vous plait, dites-moi simplement que vous êtes là pour moi, que je peux pleurer ou crier quand j’en aurais besoin, que jamais vous ne jugerez mes comportements et mes choix de continuer les traitements ou bien encore de faire une pause dans ce parcours quand cela sera devenu trop difficile à gérer.


Car n’oubliez pas, je suis toujours la même Élodie. Je suis juste encore un peu plus fragilisée par le temps qui passe et en manque total de confiance en moi face à ce que je traverse. Je suis même parfois dévastée et dépassée par tout ça, car j’étais loin de m’imaginer qu’à 31 ans j’aurais déjà eu 1 stimulation simple. et 3 inséminations. Loin d'imaginer que suite à cela, on me diagnostiquerai une endométriose profonde et que ma première FIV serait un échec total sans aucun embryon congelé.


En PMA, on peut avoir tendance a oublier l'homme, celui qui reste bien souvent en recul alors qu'en réalité, pas du tout. Lui aussi a le droit a des examens et surtout régulièrement il doit lui aussi donner un morceau d'intimité. Celui qui est toujours à mes côtés avec force et dignité et qui ne se plaint jamais. Celui qui arrive même à faire de l'humour.


J'ai aussi envie de dire à travers cette lettre, qu'il n y a pas que nous les femmes à soutenir, il y a aussi nos hommes, qui eux sont là jour et nuit à nos cotés et qui font de leur mieux pour nous accompagner et nous permettre de continuer à y croire. Il ne faut pas croire que pour eux, c'est simple. Alors à aux hommes qui liront cette lettre, soyez vigilants envers vos amis masculins qui sont dans un parcours PMA, eux aussi ont besoin de votre soutien.


Moi, je dis merci à mon mari, l’homme de ma vie qui m’accompagne du mieux qu’il peut dans cette tempête que je traverse avec des moments de grande tristesse et des moments plus stable. J’ai aussi envie de lui dire que ce combat, j’ai la force de le continuer pour lui et pour nous car ma vie c’est lui.

Certains ami-e-s et membres de ma famille, que vous êtes, tentez de combler mes plaies, me laissez un espace de parole et de pleures et essayez toujours d’avoir des mots justes. Sans vous, je pense qu’aujourd’hui je n’aurais plus la force d’avancer.


N'oubliez pas que la PMA, c'est de nombreuses injections, des piqûres à se faire sur le ventre et les cuisses, notre corps se retrouve abîmé. Nous avons le choix de faire venir une infirmière ou de faire ça seule. Pour ma part, je les fais seule. J'ai l impression de garder un minimum de contrôle sur ma vie et je ne suis pas obligée de caler un nouveau rdv quotidien "infirmière" dans mon planning. Certaines injections sont fournies sans matériel. A nous de nous fournir en aiguilles et seringues... comme si tout cela n'était pas déjà assez difficile...


Même si j'ai fait le choix de me débrouiller seule sur cette partie,


j'ai un autre merci à formuler en pensant à mes amies infirmières qui me soutiennent a tous les niveaux, amicale et professionnel.

Elles sont toujours de bon conseils et bienveillantes et c'est rassurant. Sans elles, je n aurais pas eu l'assurance de faire mes injections toute seule et je sais que quoiqu'il arrive l'une d'entres elles sera là.


Mais aux autres, qui avez toujours "le mot savant" à me dire ou une comparaison à faire, s’il vous plait, prenez-moi comme une personne à part entière qui souffre de ne pas toujours être comprise. Une personne qui est parfois jugée d’avoir à faire à la médecine pour faire un enfant. Oui, je sais que les hormones ce n’est pas bon pour la santé mais, juste une fois, essayez de vous mettre à notre place et de comprendre la souffrance et l'impuissance dans laquelle nous nous trouvons.


La PMA bouleverse une vie à tous les niveaux. Au travail il faut gérer. Il faut aussi apprendre à voir son corps se transformer car les hormones vous jouent des tour. Je l'accepte, mais ce n'est pas toujours facile, car cela permettra à mon corps d’accueillir un jour enfin notre petit bout de chou tant attendu.


Alors tous autant que vous êtes, s’il vous plait, ne mettez la pression à personne (couples et femmes) en demandant régulièrement "c’est pour quand le bébé ?". Certains d’entre nous n’arrivons pas à en avoir et au contraire certains autres n’en veulent pas et n’osent pas non plus en parler, car dans les deux cas, nous sommes jugés.

Merci à tous d’avoir pris le temps de lire ma lettre, en espérant qu’aujourd’hui vous puissiez venir vers moi naturellement me poser des questions bienveillantes sur mon parcours, sur ce que je ressens, sur comment je me sens. J’ai juste envie que la PMA ne soit plus tabou car désormais elle fait partie de notre quotidien. J’ai juste besoin de ne plus entendre des phrases toutes faites sans réfléchir qui me blessent chaque jours un peu plus.


On apprend jours après jours, de notre côté comme du vôtre, à cohabiter du mieux que l'on peut avec la PMA.

Elodie Opyrchal

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